PIERRE HENRY invité d'honneur de LUNÉVILLE
Préface de Christian GERMAK
Cet automne l'invité d'honneur de LUNÉVILLE est le peintre PIERRE HENRY.
Après CARZOU, Georges OUDOT, AVATI, il fallait continuer cette tradition
d'exception que développe le SALON D'AUTOMNE DE LUNÉVILLE.
Cette année, qui clôt notre millénaire, PIERRE HENRY tout en restant
dans cette lignée des plus grands, va nous montrer une autre face du monde
artistique dans laquelle peinture et méditation philosophique ont leur
place depuis la naissance de notre ère. Par là cette exposition ouvre
la porte et nous permet un regard sur l'annonce du troisième cycle, celui
dont André Malraux disait qu'il sera mystique ou ne sera pas.
Mais la pensée de PIERRE HENRY n'est pas celle d'un moine ou d'un religieux
contemplatif. Elle est toute autre. Elle est celle de tout homme amené
à vivre sa propre réflexion, a s'interroger sur lui-même et sur ces proches.
Puis à extrapoler cette réflexion vers le sort de l'humanité tout entière,
et par là de sa destinée dans la conception de l'Univers au travers des
temps immémoriaux et futurs.
Vaste programme que tous nos anciens avaient développé et qui fut bousculé
par le matérialisme triomphant, par la recherche d'un art plus facile
et par une création à la portée de tous, y compris dans un but égalitaire
de ceux qui se disent artistes sans en avoir la moindre miette de talent.
Tradition qui fut oubliée, et pourquoi ne pas le dire, qui fut même rejetée
par les plus médiocres, alors que d'autres continuaient à avoir un regard
vers elle.
Mais si ces "autres" admiraient ces oeuvres, dont le cri sortait du gouffre
des ans, ils n'osaient pas se risquer sur ce même chemin devenu ardu et
difficile autant qu'ingrat.
Ardu et difficile, car cette interprétation de l'Art que développe aujourd'hui
PIERRE HENRY nécessite deux critères principaux - Une peinture qui part
d'un dessin bien fait, net et lisible, donc figuratif. Lequel entrera
dans une composition parfaite pour harmoniser l'oeuvre en tant que telle,
selon des normes que les traditions ont définie avec précision pour maintenir
le rythme du tableau. Ceci aussi bien par la composition des couleurs
que par leur équilibre qui doit s'intégrer à celle des masses, tout en
laissant toute sa place à la créativité de l'artiste.
De plus, et c'est là le deuxième critère, si l'on se réfère aux peintres
qui ont illustré les monuments et les toiles depuis deux mille ans, un
message se trouve enfoui, inscrit dans l'oeuvre. Il a pour mission de
transmettre la pensée et la préoccupation spirituelle de l'artiste.
A ces difficultés s'ajoute un obstacle matériel. Cette peinture demande
des semaines et des mois de travail. Elle n'est pas accessible à tous.
Elle est moins commerciale qu'un bouquet de fleurs posé sur le coin d'une
table, ou sur un rebord de fenêtre, ou encore qu'un paysage romantique.
Son but n'est pas essentiellement d'être décorative, même si par ses qualités,
et principalement par toutes celles qu'introduit le savoir faire du peintre,
elle rentre parfaitement dans un décor moderne.
L'Artiste qui se lance dans cette voie doit avoir la foi en son Art chevillée
au corps. Car il doit créer pour créer, et s'exprimer parce qu'il a quelque
chose à dire. Son oeuvre quel que soit son prix de vente ne lui permettra
pas de faire fortune, chaque huile devant émaner d'une longue et profonde
méditation, et sa réalisation ne s'accomplira que par le détail dans la
perfection absolue.
Hélas les temps modernes ont fait disparaître les grands seigneurs, mécènes
des arts et des lettres. Mais il reste et restera toujours des PIERRE
HENRY pour continuer et faire vivre l'esprit dans un langage qui lui est
propre et par dessus les temps, tous les temps.
D'ailleurs, un constat à bien regarder, l'oeuvre de PIERRE HENRY ne s'inscrit-elle
pas comme s'intégrant dans un noeud du Temps, qu'elle provoque elle-même
?
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